Chaque année, plus de 250 villes sont candidates pour être villes étapes de départ ou d'arrivée du Tour de France. Beaucoup de postulantes et peu d'élues puisqu'au final, le Tour 2018 n'en aura retenu qu'une petite quarantaine. Et l’engouement est constant pour l’événement. « C’est probablement le rendez-vous sportif le plus important avec cette dimension de proximité immédiate, explique Thomas Cariou, chargé des relations collectivités pour le Tour de France. On va chez les gens, on passe devant chez eux : 3 500 kilomètres et 3 semaines dans les territoires, c’est la vie réelle. » Un ancrage local très fort que recherchent les collectivités, villes, agglomérations, départements. Toutes veulent valoriser leur territoire et stimuler cette proximité avec les habitants. Sans compter que le Tour de France, ce sont des retransmissions télévisées dans 190 pays et 4 millions de téléspectateurs en France chaque jour. « LeTour nous offre une visibilité immédiate et massive », confirme Norbert Métairie, le Président de Lorient Agglomération.
Les retombées sont toujours supérieures à la mise de départ
Accueillir le Tour de France a un coût : 65 000 euros pour une ville départ, 115 000 euros pour une arrivée. « Ce sont des recettes nécessaires à ASO* pour l’organisation de l’épreuve et pour apporter ses structures comme le podium, la régie... », explique Thomas Cariou. Chaque ville ou département qui accueille le Tour doit aussi répondre à un cahier des charges techniques très précis : mise à disposition d’espaces, d’équipements municipaux, de services, mais aussi capacité d'accueil, logistique particulière, etc.
Pour les collectivités locales, le Tour de France constitue à la fois un investissement et une opération rentable. Car si la mise de départ est importante, surtout pour les plus petites villes, le retour sur investissement est largement garanti. De nombreuses collectivités, ainsi qu'ASO, ont fait réaliser des études pour mesurer cet impact du Tour (lire encadré plus bas). « Les résultats sont hétérogènes, cela dépend de la capacité de chaque collectivité à absorber les retombées économiques directes. C’est-à-dire les recettes d’hébergement et de restauration de l’organisation (4 500 personnes), des 2 000 journalistes et de la caravane, et des nombreux touristes venus voir l’épreuve. L’effet multiplicateur constaté est variable », commente Thomas Cariou. Ainsi, pour chaque euro investi dans l’accueil du Tour, les rentrées oscilleront de 2 à 8 euros. « Les retombées sont toujours supérieures à la mise de départ. » Par exemple Le Havre, ville-arrivée en 2015, a affiché un ratio de rentabilité de 4,2, tandis que Livarot, ville-départ la même année, a calculé un impact économique supérieur à 9 millions d'euros, avec un ratio de 7,1**.
Le Tour a besoin des territoires pour exister
« Le Tour n’est pas l’événement d’une seule journée , confie Norbert Métairie, nous travaillons dans une logique d’héritage sur le long terme. Car Lorient a la chance d'avoir su capitaliser sur l'événementiel. Le Festival Interceltique, le FCL ou encore les grands rendez-vous nautiques sont des marqueurs territoriaux puissants que beaucoup d'autres villes de notre taille nous envient. » Accueillir le Tour, comme tout événement d'ampleur, c’est donc préparer la population en amont, faire connaître sa ville et son territoire, guider une mobilisation locale et se positionner auprès de potentiels touristes à capter. Plus qu’un événement sportif, c’est une grande fête populaire et fédératrice, et une mise en avant du territoire.
Pour Thomas Cariou, « c’est un peu Des Racines et des Ailes en même temps que la plus grande course cycliste au monde ». Avec 20 minutes de visibilité à la télévision en moyenne par ville-étape et désormais la retransmission en intégralité de toutes les étapes, le Tour permet de montrer sa ville sous son meilleur jour. Vues aériennes, directs, commentaires valorisants : une belle opportunité de se faire connaître et de se positionner sur la carte touristique. Ainsi, Arras, jusque-là méconnue en matière de tourisme, a pu mettre en avant ses atouts et changer son image. L’Alpe d’Huez a profité du Tour pour élargir sa notoriété au niveau européen. « Mais Paris n’a pas besoin du Tour par exemple. En revanche, le Tour a besoin des territoires pour exister et construire une course sportivement et esthétiquement intéressante. » Un parcours avant tout sportif donc, où la Bretagne tient, et depuis longtemps, une large place : elle reçoit en effet régulièrement le Tour car « les Bretons aiment le vélo : c’est une terre de champions, de coureurs et d 'amateurs » , souligne Thomas Cariou. Lorient ne fait pas exception à la règle. « C’est une ville suffisamment attractive, avec les capacités logistiques nécessaires et surtout une grande tradition cycliste, en témoigne Warren Barguil, maillot à pois rouges du dernier Tour de France ! »
*ASO : Amaury Sport Organisation, structure qui organise le Tour de France mais aussi le Paris-Roubaix, le Paris-Nice, la Vuelta (Espagne), le Rallye Dakar ou encore le Marathon de Paris.
**Étude PwC - Repucom 2015
Metz : "Le Tour vaut l'investissement"
La ville de Metz a accueilli le Tour en 2012 (elle l'avait déjà fait 30 fois depuis la création de la grande boucle), et commandé une étude sur les retombées économiques de l’événement. Les explications de Marina Lallement-Wagner, directrice de la communication et de la promotion de l’agence de développement économique Inspire Metz.
« L’étude comporte deux enquêtes : l’une menée auprès de 500 spectateurs (hors Messins) et l’autre auprès de 150 professionnels. Notre objectif était de connaître les retombées économiques du Tour mais aussi de mieux comprendre les comportements des spectateurs. Les résultats montrent que les publics du Tour sont surtout des hommes plutôt jeunes, qu’ils viennent de Metz pour 52 %, 14 % sont étrangers. Un quart d’entre eux sont des touristes, dont 75 % d’excursionnistes (venus à la journée, ils sont fréquents à Metz qui est une ville frontalière). Par ailleurs, 40 % de ces touristes venaient pour la première fois et en majorité pour le Tour de France. Ces données confirment l’attractivité du Tour et sa capacité à fédérer localement, ce qui participe à créer un sentiment de fierté et d’appar- tenance à Metz. La fréquentation était maximale sur le territoire avec 90 % de taux d’occupation pendant le Tour (contre 50 à 60 % habituellement). Globalement, on a mesuré 517 000 euros de retombées économiques liées aux spectateurs, et 156 000 euros liés aux professionnels. Soit un total de 673 000 euros qui n’auraient pas été dépensés sur place s’il n’y avait pas eu le Tour... Enfin, la perception de la destination a aussi évolué : l’image de Metz a été perçue comme très positive par les touristes suite à leur séjour (73 %). Ils expriment d’ailleurs l’intention de revenir. »