Il est 11h30, les tables sont déjà dressées. Dans quelques minutes, la centaine d’enfants de l’école élémentaire Joliot-Curie, à Lanester, va prendre d’assaut la cantine qui jouxte la cuisine centrale. Aujourd’hui, le menu à thème met en vedette la pomme d’Inguiniel : salade de carottes bio de Pontivy et pommes, jambon à l’os du Blavet avec grenaille bio, pommes cuites et sauce au cidre, en dessert pomme bio rouge. « Je mets la priorité sur les produits locaux, explique Régis Onillon, directeur de la cuisine centrale de Lanester. Et le bio est exclusivement local. On propose environ un produit bio par jour ; si l’on ne peut pas en avoir, on va quand même privilégier le produit local. » Ainsi, dans les cuisines se croisent des légumes cultivés à Pontivy, des kiwis de Caudan, de la charcuterie du Blavet, du poisson frais du port de Lorient, des biscuits bretons de chez Ker Cadélac, des produits laitiers bio de la Ferme du Blavet…
"Je mets la priorité sur les produits locaux"
Ici, pas de plats préparés. Tout est réalisé à la cuisine centrale à partir de matières premières, excepté les pâtisseries. « Les produits sont de meilleure qualité et extra-frais, ils ont plus de goût, assure Régis Onillon. Ça fait fonctionner l’économie locale et ça participe à l’éducation alimentaire des enfants et des parents ; on respecte la saisonnalité et c’est équilibré. Je donne des informations sur les produits, je vais dans les classes présenter les légumes anciens, je visite aussi tous les fournisseurs… » Et ça fonctionne : les enfants sont plus réceptifs, plus attentifs à ce qu’ils mangent.
À Lanester, une soixantaine de fournisseurs alimentent la cuisine centrale qui prépare 1800 repas chaque jour, dont 1400 pour les scolaires. « Nous avons lancé des marchés de telle manière que même les plus petits récoltants puissent candidater et que nous, nous évitions les centrales d’achat. » Ce n’est pas toujours facile de préférer le local : cela signifie plus de fournisseurs, plus de livraisons, plus de manutentions, plus de gestion administrative…« Je fais aussi attention à m’adapter aux saisons et aux productions, reprend Régis Onillon. Je prévois mes menus en fonction des récoltes. Si la météo a été mauvaise et que je n’ai pas assez de fraises de Rédéné, tant pis, mais je n’irai pas vers de la fraise d’Espagne ! » Et puisque le chou de Lorient est à redécouvrir, le chef a réussi à trouver la recette qui plaît aux enfants : en crudité avec une sauce onctueuse au fromage.
Régis Onillon veille également à lutter contre le gaspillage alimentaire. Ici, pas de barquette ou de portion individuelle : on se partage les petits pains, on se sert dans un plat collectif pour chaque table. « On propose le fromage à la coupe en début de repas :les enfants le mangent selon leur envie, en cube dans la soupe, en fin de repas, dans une salade… Et ainsi, nous n’avons plus du tout de perte ! »
De bonnes pratiques à partager
La ville de Lanester est l’une des communes de l’Agglomération déjà engagées dans l’approvisionnement local. C’est d’ailleurs l’une des pistes de développement proposées dans le PAT (Plan alimentaire territorial) porté par Lorient Agglomération, un projet récompensé lors du dernier salon de l'agriculture par le Ministère, qui vise à favoriser l’éducation alimentaire et le bien-manger. Dans le Pays de Lorient, plus de 18000 enfants sont ainsi concernés par les restaurations collectives municipales qui ont un rôle à jouer dans leur éducation alimentaire. « Ce plan cible la jeunesse, très touchée par le surpoids car il concerne aujourd’hui un enfant sur cinq, explique Tristan Douard, vice-président à Lorient Agglomération. En puisant dans les bonnes idées et les pratiques des communes les plus vertueuses en la matière, comme Lanester, Lorient, Plœmeur ou encore Quéven, nous allons proposer d’étendre le principe d’une filière d’approvisionnement local, bio si possible, à toutes les cantines scolaires du territoire. » Aide pour trouver des fournisseurs, pour écrire les cahiers des charges, pour adapter son organisation... Mais aussi, en parallèle,des actions de sensibilisation avec des associations locales, autour de l’agriculture durable,d’ateliers de cuisine, d’informations sur la diététique… « Parce que ce que nous mangeons aune influence sur notre santé. »
Pour une filière alimentaire locale
Cela fait plus de 16 ans que Lorient Agglomération se préoccupe de la place et de l’organisation de l’agriculture sur son territoire. Après une première charte de l'agriculture signée en 2001, un nouveau texte qui englobe agriculture et alimentation a été adopté le 4 avril 2017 afin de soutenir ce secteur. Elle prend en compte toutes les évolutions économiques, sociétales et environnementales : on parle aujourd’hui par exemple d’agriculture bio, de circuits courts, de développement de circuits locaux. Par ailleurs, l’alimentation est entrée au cœur des préoccupations et elle est indissociable de l’agriculture et du maintien de son économie. Cette nouvelle charte réunit collectivités (Lorient Agglomération et CCBBO - communauté de communes de Blavet Bellevue Océan - notamment), institutions et acteurs socio-économiques autour d’un projet agricole pour le Pays de Lorient. Le texte s’oriente selon 4 défis principaux :
- préserver et valoriser les ressources de l’agriculture et l’emploi ;
- construire le projet alimentaire territorial ;
- promouvoir la qualité territoriale du Pays de Lorient et favoriser la transition ;
- animer et évaluer la charte.