Dès 1933, la Chambre de commerce souhaite implanter un terrain d’aviation dans le département. En 1938, elle achète un terrain à Lann-Bihoué, aux confins de Ploemeur et Quéven. Mais, ne pouvant en assumer les lourdes dépenses, elle vend en décembre 1939 ses 42 ha à l’Armée de l’air, pour le compte de l’aéronautique navale. La Marine lance aussitôt la construction d’un premier hangar. Mais nous sommes déjà en avril 1940. Trop tard. À peine conçu, le projet de base aéronavale est coupé dans son élan par l’arrivée des Allemands le 21 juin 1940. Ceux-ci vont donner à la base une dimension considérable, passant des 42 ha primitifs à 1 200 ha (12 km²) étalés sur Guidel, Ploemeur et Quéven, ce qui en fera la plus grande base d’Europe, base que les Allemands appellent Kerlin Bastard. Pour ce faire, des dizaines de fermes, abritant 125 personnes, vont être sacrifiées au fur et à mesure de l’avancement des travaux commencés en mars 1941 et pilotés par l’ingénieur Fritz Todt.
Des entreprises aux puissants moyens mécaniques s’activent : la firme Eppler fournit des pierres depuis Kervinio, un hameau tout proche ; des milliers de mètres cubes de terre sont charriés depuis le Resto, juste à côté de l’aéroport. Deux pistes, longues de 2 000 mètres, sont achevées, l’une est-ouest en août 1941 et l’autre nord-sud en avril 1942. Les avions gagnent leurs 75 hangars par des chemins de roulement de 20 km au total. La base est protégée par de nombreux bunkers, des batteries de DCA (défense antiaérienne) comme celles de Moustoir Flamm, du Cosquéric ou de Kermabo.
Les Heinkel bombardent les convois angloaméricains
Dès la fin 1941, les premiers appareils de la Luftwaffe atterrissent sur la base. En juin 1942 on y compte une centaine d’avions. Les Heinkel assurent les reconnaissances au profit des sous-marins (U Boote) et bombardent les convois angloaméricains. Les Junker 88 sont surtout chargés de combattre les avions alliés anti sous-marins. La bataille de l’Atlantique étant gagnée par les Alliés, l’activité de Kerlin Bastard, dont les pistes sont régulièrement bombardées par les Alliés, va décliner jusqu’en août 1944. Mais le 7 août, la batterie de Moustoir Flamm va tuer une trentaine d’Américains à Bivière (entre Quéven et Pont- Scorff), freinant ainsi l’avancée des troupes alliées vers Lorient. La Poche de Lorient va alors se fermer durant 9 longs mois…
À partir de la Libération, le 10 mai 1945, 16 000 prisonniers allemands vont transiter par Lann-Bihoué avant leur retour en Allemagne quelques mois ou années plus tard. Les travaux de remise en état de la base vont alors commencer et la Marine s’installe définitivement dans les lieux le 1er avril 1946.
Aujourd’hui, la base aéronavale de Lann-Bihoué (BAN) s’étend sur 800 ha. Elle est, avec ses 2 000 employés et à côté de son activité militaire, un acteur économique majeur du Pays de Lorient.